Les indications qui suivent concernent moins la vie passée de la famille dans les différents lieux où elle a vécu, que la trace matérielle qu’elle a laissée dans ses séjours et qu’on peut voir encore actuellement.
La première recherche eut demandé trop de liberté d’allures, trop de loisirs pour être entreprise. La seconde nécessitait moins de travail. Tout ceci expliquera l’objectif limité de ces indications.
Signalons avant de commencer que la mention " Seigneur de… " était souvent, autrefois, un qualificatif de courtoisie employé maintes fois dans les actes concurremment avec l’expression plus exacte de " Seigneur pour partie de… ". En effet, le propriétaire d’un minuscule fief, démembrement d’un fief principal, se laissait donner de la Seigneurie du nom de la paroisse qui eut dû être réservé au seul possesseur du fief principal.
Qui voudra s’intéresser au droit féodal normand devra d’ailleurs se reporter à l’étude magistrale du commandant NAVEL, dans le Bulletin de la Sté des Antiquaires de Normandie, Tome LI : ce grand érudit avait projeté une œuvre plus complète encore, mais il en fut empêché par le bombardement de Caen en 1944, qui a anéanti sa documentation, résultat de vingt années de recherches.
Victor des DIGUÈRES a écrit en 1879, sur les familles ayant vécu à Argentan, un ouvrage intitulé " la Vie de nos pères en Basse-Normandie ". Il y a étudié en particulier la branche des GAULTIER de Chiffreville et donne de nombreuses indications sur d’autres branches GAULTIER qu’il orthographie toujours " de GAUTIER ".
Voici ce qu’il dit sur leurs lieux de séjour à ARGENTAN1 et voici ce qu’il en reste à ce jour d’après les indications de Xavier ROUSSEAU, le directeur de la revue " le Pays d’Argentan " " … La rue de la Chaussée, hantée surtout par le commerce, avait pourtant … l’hôtel situé de l’autre côte du pont, sur le bord de l’eau, longtemps habité par Madame de GAUTIER de MONTREUIL… "
Cet hôtel a été démoli par les bombardements de 1944. " … Dans la rue de la Poterie d’un côté … l’hôtel de GAUTIER… "
L’ordre suivi par Victor des DIGUÈRES pour les hôtels de la rue de la Poterie donne à penser que l’hôtel GAULTIER a été remplacé par une demeure nouvelle qui subsiste. Cependant le plan Boughier de 1755 place plus bas, vers la rue de la République, l’hôtel GAULTIER : là depuis 1944 c’est table rase.
Ainsi, en tout état de cause, ces deux hôtels ont disparu dans leur forme ancienne ; reste pourtant un témoin du passé qui demeure encore.
" … en 1632 Jacques GAUTIER, Sgr de Montreuil et Chiffreville, vicomte d’ARGENTAN (après son père Jacques GAUTIER, premier du nom, qui exerça cette charge de 1576 à 1595) sur un terrain au nord de l’église St-Germain, fit construire une chapelle sous l’invocation de St-Jacques-le-Majeur, son patron, et fit mettre l’inscription suivante sur une plaque de marbre :
Haec capella constructa est in honore Dei maximi, Beatae Virginis et Beati Jacobi Majoris, per Jacobum Gautier, nob. Anno 1632.
Cette chapelle fut l’œuvre d’un architecte en renom, Maurice GABRIEL. Le caveau contenu dans cette chapelle renfermait la dépouille mortelle du fondateur et plusieurs de ses descendants.
Lors de la révolution de 1789, leurs restes furent retirés et jetés dans une fosse creusée auprès de la chapelle Saint-Mansuet : les ossements de la bienheureuse Marguerite de Lorraine les y rejoignirent. Puis le temps passa et au XIXe ce caveau abandonné depuis la Révolution fut dégagé des nombreux débris qui l’obstruaient et, rendu à son état primitif, reçut à nouveau, exhumés de la fosse, les restes de ces vénérables défunts dont une pierre commémorative rappela le souvenir, par les soins de l’abbé Jamet, curé archiprêtre d’Argentan. Sur cette pierre incrustée dans le mur latéral de la chapelle, à l’intérieur de l’église, se lit l’inscription suivante encadrée d’un listel peint en rouge.
Ici reposent hauts et puissants seigneurs :
Jacques de GAUTIER, écuyer, vicomte d’Argentan, fondateur de cette chapelle, décédé en 1635 et Marie de CORDOUAN, son épouse.
Charles de GAUTIER, décédé le 4 mars 1680 et Marie Madeleine du PLESSIS CHATILLON, son épouse.
André de GAUTIER, décédé le 22 août 1677. Jeanne LE FESSIER des AULNES, épouse de François de GAUTIER, décédée le 21 avril 1760.
Jacques de GAUTIER, Sgr du Tilleul, décédé le 20 août 1724.
et " autres membres de la famille Expectantes beatam spem… "
La liste précédente est sans doute encore incomplète, d’où la formule " et autres membres de la famille ".
Si Victor des DIGUÈRES dans son livre disait avoir apprécié, lors de la restauration du caveau " ses vastes proportions comme la solidité de sa construction ", telle dut être la pensée du curé de St-Germain qui, au cours du bombardement de 1944, se réfugia dans ce caveau après la destruction de son presbytère (ancien hôtel de Sainte Croix), le 6 juin jusqu’au 13 août ; lorsque Argentan fut libéré, la chapelle et ses deux plaques commémoratives étaient intactes. La chapelle est actuellement " en fait d’annexe un ignoble dépotoir. Si l’autorité ecclésiastique avait un peu de goût, elle débarrasserait cette chapelle magnifiquement décorée et digne d’attention ".
Faisons-en le vœu avec Xavier ROUSSEAU auteur de ces lignes.
Le fief de Beaurepaire est situé au sud d’Argentan, sur la commune de Loucé. Après avoir appartenu aux GAULTIER du milieu du XVe au milieu du XVIIe, il est entré dans la famille de MÉSENGE qui le possède depuis.
Mademoiselle de MÉSENGE de BEAUREPAIRE, dernier représentant de cette famille, ayant épousé le baron de LOYNES de FUMICHON, veuf en premières noces de Constance de MAISTRE, c’est actuellement un des enfants de ce premier mariage qui s’occupe de cette propriété.
Elle comprend d’abord un petit manoir paraissant appartenir à la fin du XVIe, début XVIIe : il n’est donc pas impossible qu’il ait été bâti par le GAULTIER autorisé en 1600 à reprendre le nom de BEAUREPAIRE. On ne trouve pourtant aucune trace de son passage, ni armoiries, ni date gravée dans la pierre : sans doute, près de la lucarne centrale, y a-t-il un écusson, mais les armes que celui-ci portait ont été grattées à la Révolution probablement.
Flanquant le manoir, deux corps de communs s’élèvent détachés, à droite et à gauche. A proximité immédiate se trouvent les bâtiments de la ferme, la plus grande autrefois de la commune. Mais la superficie en a été réduite de moitié après des ventes vers 1935 et ramenée alors à quelque 37 hectares.
L’église de Loucé, qui daterait du XIIe d’après des indications de la Mairie, ne contient pas de tombes familiales.
Madame de FUMICHON possède aussi, en provenance de la famille MÉSENGE, une autre propriété au Goulet (Orne). Il s’y trouve des archives concernant entre autres la terre de Beaurepaire : leur dépouillement a donné quelques renseignements intéressants sur celle-ci.
La seigneurie de Brocottes s’étendait sur la paroisse de ce nom et sur la paroisse de Ham, tandis que la seigneurie de Beuvronnet s’étendait sur la paroisse de Beuvron et aussi sur celle de Ham, ainsi que sur divers autres terroirs.
La seigneurie de Brocottes était constituée par ¼ de fief de haubert dont le chef était assis aux paroisses de Brocottes et de Ham ; elle s’étendait à celle de Brucourt et relevait du fief de Brucourt.
Elle fut possédée au tout début du XVIe par Philippe de la RIVIÈRE, puis vendue le 15 mars 1573 à. Jacques de COURSEUIL, Sgr de Langle, et cédée en 1719 ou 1728 à Jacques Charles Alexandre de BEAUREPAIRE, Sgr de LOUVAGNY. Celui-ci en fit aveu le 4 juillet 1732 à M. TURGOT pour sa baronnie de Brucourt (voir X).
En 1683, le domaine non fieffé contenait 60 acres et le domaine fieffé 320 acres avec les vavassories
de la Louve | 69 acres |
de Quaranteville | 13 |
de Pirotte | 28 |
de Routine | 14 |
de Maugeant | 134 |
258 acres |
En 1785, un plan de Brocottes conservé aux Archives Départementales du Calvados donnait comme superficie du domaine : 10 0001 arpents, 57 perches ou 625 acres et demie, 1 verge et demie, 17 perches c’est-à-dire 608 ha environ2.
La seigneurie de Beuvronnet fut acquise par Jacques Charles Alexandre de BEAUREPAIRE, Sgr de LOUVAGNY, le 21 décembre 1727 ; son chef était assis aux paroisses de Beuvron et de Ham ; elle s’étendait aux paroisses de :
Beuvron Airan
Putot Quatre-puits
Bray-la-Champagne Cesny-aux-Vignes
Fierville Croissant-ville.
Elle relevait de la Seigneurie de Beuvron et de la baronnie de Beaufour. Le fief de Beuvronnet était en plein fief d’haubert dont relevaient un demi fief de Bray-la Champagne et un 1/8 de fief de Merbre-au-Santon.
La Seigneurie de Beuvronnet avait été constituée en 1515 par le Sgr de Beuvron au profit de M. de COURSEUIL ; elle passa par alliance en 1617 à Charles DESCHAMPS, Sgr de Lépinay, puis par échange en 1654 à Jean LE SENS, Sgr du Meny (ou Ménil), puis par héritage à Marie GOSSE (veuve de Messire Nicolas LE BOULENGER) qui la vendit à Jacques Charles Alexandre de BEAUREPAIRE. Celui-ci versa le 22 juin 1730 1 200 livres pour le troisième au duc d’Harcourt à cause de sa baronnie de Beaufour (voir X).
Sur le territoire de Brocottes s’élevait le manoir de l’Épiney3 dont le nom fut porté par un des fils de Jacques Charles Alexandre de BEAUREPAIRE tout au long de sa carrière militaire, car tous les actes qui le concernent le nomment exclusivement M. de l’Épiney.
Le manoir de l’Épiney, avec une trentaine d’hectares, fut vendu le 31 décembre 1835 par Urbain de BEAUREPAIRE à Mr Jacques BOURGET, puis en 1875 par celui-ci à M. Edmond CAPELLE, arrière-grand-père par alliance de M. Guy PATUREL qui exploite actuellement ces herbages. Le vieux manoir à colombage détruit par M. Jacques BOURGET fut remplacé par une banale maison en pierre de Caen de style empire. Seuls les communs qui subsistent sont du XVIe d’après M. BOURDON, beau-père de M. PATUREL.
Lors de la révolution de 1789, l’église fut pillée par les habitants et le mobilier brûlé : actuellement un banc porte pourtant encore le blason colorié de la famille BEAUREPAIRE.
Ce banc a été peut-être rétabli sous cette forme pendant la Restauration, car, après la vente de l’Épiney en 1835, un autre manoir à colombage " le Mesnil4 " avec quelques pacages demeura la propriété de la famille. Sans doute était-ce Alexandre de BEAUREPAIRE, en déplacement de Louvagny, qui venait faire des séjours au Mesnil et s’installait dans ce banc le dimanche pour entendre la messe : M. BOURDON avait connu vers 1900 une femme alors âgée qui se souvenait encore des passages, dans ce coin de terre, d’un vieux M. de BEAUREPAIRE. Il semble que ce devait être Alexandre, car son frère Urbain qui avait vendu l’Épiney, aurait aussi bien vendu en même temps le Mesnil, s’il lui avait appartenu également.
Le manoir du Mesnil existe encore, plus ou moins en ruine et en tout cas inhabité depuis longtemps.
Victor Guyon des DIGUÈRES, dans son Histoire de Sévigni, écrite en 1865, donne des renseignements intéressants sur les GAUTIER de Chiffreville.
Il indique en effet que la paroisse de Sévigni contenait d’abord deux fiefs nobles, Sévigni et Chiffreville, puis trois, par un démembrement de Chiffreville dont sortit le fief noble de Bellegarde, origine de la famille du FOUR de BELLEGARDE.
Le domaine de Chiffreville fut acquis au début du XVIIe, car la première mention s’en trouve dans un acte du 18 juin 1628 avec Jacques de GAUTIER, Sgr de Montreuil sur la paroisse de la Cambe. Héritiers par alliance des GAUTIER de CHIFFREVILLE, les CHOISEUL PRASLIN vendirent cette terre vers 1840 au Dr BACON de Falaise, dont le gendre M. CHOPIN la vendit à son tour vers 1916. A cette époque, elle ne comprenait plus que 200 ha qui furent divisés en 3 lots :
Les bâtiments et 50 ha appartiennent à la famille MESLAY.
Une lande éloignée près du domaine de Bellegarde passa à M. de MOIDREY.
Le reste fut acquis par M. M. TERRÉ et FONTAINE.
Le manoir Louis XIII des GAUTIER, situé dans la cour de la ferme de Chiffreville existe toujours, bien que des bâtiments voisins aient été détruits par la guerre en 1944 : on y voit un très bel escalier de pierre à la française avec balustres, qui est resté en très bon état.
La chapelle seigneuriale servait autrefois d’église à Sévigni et est de ce fait assez vaste : on y trouve un très bel autel de pierre, mais pas de plaques tombales, car les inhumation de la famille se faisaient à la Chapelle de l’église St-Germain d’Argentan, dont il a été question ci-dessus.
On trouve enfin dans la ferme de Chiffreville une magnifique grange avec une charpente ancienne qui mériterait à elle seule le classement.
L’église de Sévigni contient une plaque de marbre noir sur le mur latéral du chœur, côté Evangile, qui porte l’inscription suivante :
" Ci-gist le cœur de Messire Charles de GAUTIER, chevalier, seigneur de Chiffreville, St-Victor, la Fuie et Mosronne, qui décéda le 4 mars 1680 âgé de 72 ans. Priez Dieu pour le repos de son âme. "
La chapelle de Chiffreville fondée sans doute au XIe reconstruite en dernier lieu au XVIIe, avait gardé son chevet du XIIIe. L’exploitant agricole a défiguré la porte principale du manoir et démoli, très satisfait à l’entendre, la chapelle en 1956, paraissant en tirer gloire auprès des visiteurs.
Par les soins de Xavier Rousseau, le très beau retable de la chapelle avait été transposé à l’abbaye du Bec-Hellouin. Déposé dans un local en retrait, des iconoclastes imbéciles l’ont détruit par jeu, les moines ayant négligé de le rétablir en lieu et temps utiles.
Alfred de BEAUREPAIRE, dans sa généalogie écrit : " … Marc Antoine, 1652-1714 est enterré à Damblainville où sa tombe se voit encore (voir IX bis).
Le marquis de BEAUREPAIRE, mort le 2 août 1785 fut enterré à Damblainville ; sa femme Charlotte d’OILLIAMsON, morte vers 1770 fut enterrée à Damblainville dans la chapelle seigneuriale où sa tombe se voit encore.
La tombe du marquis de BEAUREPAIRE se voit encore, ainsi que celle de son père Marc, mort en 1744 et une autre dont la date est effacée… "
GALERON, dans la Statistique de l’arrondissement de Falaise, parle aussi de la tombe de Marc Antoine dans l’église, où se trouve aussi " la tombe brisée d’un BEAUREPAIRE avec des armes ". Le cimetière contient enfin, selon lui, " une tombe renversée, c’était celle d’un BEAUREPAIRE ".
CAUMONT décrit la tombe de Marc, comme elle est rapportée ci-après et indique aussi qu’il existe d’autres plaques tombales dont celle de Camille d’OILLIAMSON, décédé en novembre 1867.
Actuellement ne paraît subsister dans l’église, au chœur, que la place de Marc, avec celles d’un ancien curé et d’un Robert RENAULT, Sgr de Damblainville.
Sur le tombeau de Marc, on lit :
" Messire Antoine Marc de BEAUREPAIRE, chevalier, Sgr de Damblainville, décédé le 22 janvier 1744 âgé de 53 ans. Priez Dieu pour le repos de son âme. "
Sur le haut de la plaque est gravée une couronne de marquis ; des armoiries, on ne voit plus que la gerbe placée en pointe et le contour de l’écusson. Celui-ci est entouré d’une sorte de palme d’un effet plus heureux que les anges qui servent de supports le plus souvent.
Dans le bas de la plaque, des ossements sont dessinés.
Il convient de noter que la chapelle côté Evangile est recouverte d’un plancher comme à Vendeuvre. La voûte de la chapelle côté épître, porte en clé un écusson de pierre : le badigeon en blanc qui le couvre peut cacher des armoiries peintes.
Quant au cimetière, aucune recherche n’y a été faite. Mais à Damblainville, des pierres tombales anciennes servent à étayer les terres quand les allées sont légèrement en contrebas : il est à craindre que la plaque signalée par GALERON ait servi à pareille office.
Sur Damblainville se trouvait le château de Mesnil-Soleil à 3 km du village : il est possible qu’il ait été bâti vers 1780 par TRÉPLOT, élève de COUTURE, puisque cet architecte édifia le château de Coulibœuf pour le comte d’OILLIAMSON, lieutenant-général 1738-1830, beau-frère du marquis de BEAUREPAIRE qui habitait la terre de Mesnil-Soleil.
A la mort du marquis de BEAUREPAIRE, les terres sur Damblainville et Mesnil-Soleil, le château furent vendus à M. d’ESNOS pour couvrir les dettes de la succession. M. d’ESNOS eut une fille qui épousa M. de CHAPPDELAINE. La famille CHAPPDELAINE vendit vers 1930, le château de Mesnil-Soleil, au professeur Paul PASCAL de l’académie des Sciences, mais le château du XVIIIe avait disparu entre temps remplacé par une bâtisse moderne, genre villa normande.
La terre a été morcelée et il ne reste plus autour de la demeure qu’un parc avec une ferme de 60 ha environ.
Des portraits de famille étaient restés dans les greniers de Mesnil-Soleil : au cours d’une visite d’un des descendants du marquis de BEAUREPAIRE aux CHAPPDELAINE vers 1850, le fait fut mentionné ; les tableaux descendus du grenier, le visiteur, les trouvant affreux, s’exclama qu’il n’y avait qu’à les brûler !
Si les principaux lieux de séjour de la famille depuis son origine du XVe jusqu’au XVIIIe se situent tous en Normandie, la chute en quenouille de la terre de Louvagny au XIXe allait s’accompagner d’une dispersion de la famille dans toute la France. Avant cette dispersion, un point de concentration devait pourtant encore subsister en Picardie pendant plus d’un demi-siècle, de 1840 à 1912.
En effet, tandis qu’Alexandre de BEAUREPAIRE vivait jusqu’à sa mort en 1862 à Louvagny, son frère Urbain épousait en 1827 en secondes noces Melle de la MYRE appartenant à une famille solidement enracinée dans le Nord. Aussi, après avoir séjourné dans une propriété de sa belle-famille à Champey, près de Pont-à-Mousson5, sous l’influence de sa femme qui voulait se rapprocher de ses parents, Urbain de BEAUREPAIRE achetait Filescamps. Cette demeure se trouvait à 4 km de Grivesnes où habitaient toute l’année M. et Mme de la MYRE, née GOUSSENCOURT.
Grivesnes comprenait une seule ferme attenante au château : cette ferme comportait 132 ha. Un parc de 19 ha faisait partie de la propriété. Le tout fut vendu le 2 juin 1899 par Raoul de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY qui était le petit-fils de Mme de la MYRE, née GOUSSENCOURT, car celui-ci, en raison d’exploitations déficitaires, dut se séparer de cette terre pour couvrir ses dettes. Pendant la guerre de 1914-1918, une partie du château fut détruite : elle n’a pas été reconstruite. L’église de Grivesnes avait été bâtie en 1835 par Mme de la MYRE et consacrée en 1845 le 26 novembre par Mgr MIOLAND, évêque d’Amiens : elle avait coûté 400 000 francs et contient un vaste caveau où se trouvent les corps suivants :
En dehors de la ferme de Grivesnes, M. et Mme de la MYRE possédaient :
Le château et la ferme de Filescamps furent achetés en 1840 à Mesdemoiselles Pauline et Antoinette de BRACHES. La demeure se trouvait près d’Aubvillers dans le voisinage de la route allant d’Hargicourt à ce village : il y avait à peu près 400 m de la route à la maison. La paroisse était à Braches, mais une chapelle dans le château de Filescamps dispensait le plus souvent de se rendre à Braches.
La propriété fut léguée en 1912 par Charles de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY, fils d’Urbain de BEAUREPAIRE à son neveu Louis de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY. La maison ayant été ravagée au cours de la guerre 1914-1918, Louis de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY qui n’habitait pas la Picardie vendit après la guerre le château, le parc de 7 ha et 113 ha de terres. La ferme de Filescamps subsiste toujours.
Un souvenir de la famille subsiste à Moreuil qui est le chef-lieu de canton. En effet, un monument aux morts de la guerre de 1870 y portait les noms d’Henri et d’Emmanuel de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY. Détruit par la guerre, ce monument fut réédifié et porte toujours ces deux noms.
Alfred de BEAUREPAIRE a écrit dans sa généalogie vers 1850 : " … Phélippot GAULTIER fut enterré à Jort, seigneurie qu’il avait acquise et dont probablement il bâtit l’église car elle est du XVe et ses armes se voient encore des deux côtés de la porte. Il fit faire sous le chœur un caveau où il déposa les restes de ses ancêtres.
On voit encore dans le bourg de Jort une tourelle, reste de l’habitation de son fils Jean… "
Phélippot GAULTIER avait bien dès 1455 une terre noble à Jort. Par contre, la seigneurie de Jort elle-même ne fut acquise que le 25 mars 1549 des religieuses de Villers-Canivet par son petit-fils Gratien de BEAUREPAIRE.
Quant aux armes situées des deux côtés de la porte de l’église, elles ont été vraisemblablement grattées ou peut-être seulement cachées sous l’enduit dont on a recouvert les murs pour en égaliser la surface. Rien n’est visible en fait, car une restauration bien maladroite de l’église fut entreprise au début du XIXe par le curé, l’abbé Lucas. Celui-ci déplaça le maître autel, refit un pavement moderne et sortit les " vieilleries " dont deux bénitiers placés dans le cimetière et disparus un jour pour aller empierrer quelque chemin ou être incorporés dans quelque construction.
Si le cimetière renferme encore quelques tombes ecclésiastiques anciennes, les plaques tombales de l’église ont disparu, cela a déjà été dit, comme les deux bénitiers, sans laisser de traces.
Qu’est-il advenu des tombes GAULTIER elles-mêmes. Celles-ci étaient dans le chœur jadis situé au centre de l’église sous le clocher avant son transfert par l’abbé Lucas au fond de l’église : les tombes qui n’ont pas été déplacées sans doute doivent dès lors se trouver à hauteur de vitrail donné par M. RACINE.
L’entrée du caveau a été murée et condamnée pour assurer la consolidation de l’église, à la suite de menaces d’effondrement : on remarque, en effet, une porte basse murée sur le côté extérieur de l’édifice, qui doit être celle du caveau.
Le château de Jort n’offre plus que quelques vestiges, ou du moins les constructions modernes qui l’enferment peut-être encore ne laissent voir que peu de choses.
Sur le bord de la rue principale il y a encore, à mi-hauteur d’une maison, une tourelle. Sa faible distance du sol (à 3 ou 4 mètres) tient au fait que le terrain a dû se rehausser, car deux étages de salles se trouveraient actuellement sous terre. Contournant cette maison et entrant dans une ruelle, on découvre d’autres traces de la vieille demeure ne contenant ni inscriptions, ni armoiries, On peut noter un écusson en blanc dans un escalier à colimaçon : cet écusson paraît ne jamais avoir été gravé. Un pressoir de meule, en forme d’anneau creux, dans lequel roulait une roue de pierre, existe encore.
Le propriétaire de la maison à la tourelle était en 1937 un notaire6 retraité, M. DAVID. Ce vieux monsieur très digne, en jaquette et melon, savait que ce château avait été habité autrefois par les BEAUREPAIRE : le souvenir de leur passage dans Jort n’était donc pas complètement effacé. Selon lui le château remontait à Philippe Auguste ; des petites dalles en céramique du XIVe se trouvaient dans un coin de sa maison, déposées à l’occasion de quelques travaux intérieurs.
Pour terminer, notons que Jort fut jadis un établissement romain important et que des restes intéressants y sont encore maintenant fréquemment mis à jour. Frédéric GALERON a étudié cette question dans une plaquette éditée à Falaise en 1835 et intitulée " Sur l’établissement romain de Jort ".
On ne peut savoir si les BEAUREPAIRE, Sgrs de Joué-du-Bois, avaient leur fief le plus ancien dans ce lieu ou à Beaurepaire, sur Loucé. En tout cas, au moment de la disparition des représentants masculins de cette famille, dans la première moitié du XVIe, c’était le fief de Joué-du-Bois qui était le plus important, base de leur fortune matérielle et leur lieu de séjour.
Relevant de la baronnie d’Asnebecq, la seigneurie de Joué-du-Bois qui, dès le début du XIVe appartenait à la maison de BEAUREPAIRE, était, d’après le comte de CONTADES (cf. La Chaux) un quart de fief de haubert, tandis que l’abbé Maté (cf. Monographie de Joué-du-Bois) écrivait qu’il s’agissait là d’un fief de chevalier ou haubert, tenu à fournir un archer monté et armé, quand le ban et l’arrière-ban étaient appelés.
Une très ancienne église existait autrefois à Joué-du-Bois ; le chœur avait été édifié au XIe ou XIIIe ; la nef et le portail appartenaient au XIIe ; devant le portail, la tour du XVe était percée de meurtrières dans les étages inférieurs pour appuyer la défense du Manoir. D’anciennes pierres tombales avaient été utilisées pour monter les angles de cette tour et certaines étaient restées gravées.
L’ancienne église fut détruite en 1877 et remplacée par l’église neuve qui s’élève sur l’emplacement de l’ancienne, à la perpendiculaire de celle-ci. Un seul souvenir subsiste de la démolition : un linteau de porte en granit provenant d’une des chapelles fut conservé et placé dans le mur Ouest du clocher actuel. Ce linteau reproduit côte à côte 3 écussons :
Dans la nouvelle église, un vitrail moderne reproduit encore les armes des BEAUREPAIRE, d’après l’abbé Dumont, curé de Joué-du-Bois depuis 1938 environ.
Sur le territoire de la commune, on trouve encore un autre souvenir des BEAUREPAIRE : dans la chapelle St-Roch, il y a une statue de ce saint dont le lévrier porte les armes des LE VERRIER du CHAMP de la PIERRE9 et des BEAUREPAIRE.
Le vieux manoir qui servait d’habitation aux seigneurs de Joué-du-Bois, défendu en partie par l’église dans le passé est un des rares modèles de l’architecture semi-militaire de cette époque. Il fut bâti au XVe, par conséquent sans doute par Ambroise de BEAUREPAIRE, père de Jacqueline de BEAUREPAIRE qui épousa en 1497 Jean GAULTIER, Sgr de Jort et de Pierrefitte. Cette demeure fut habitée jusqu’en 1785 par ses descendants en la personne des LE VERRIER et après des LANGLOIS.
Voici la description qui en était donnée en 1935 par les Annales de l’Association Normande :
" … Le corps de logis est flanqué d’une tour pointue. Autrefois, il était plus important, mais sa partie droite a été abattue. Il est entouré d’un jardin circonscrit par des murailles flanquées de tours en bon état de conservation dont le pied est baigné par l’eau dans de vastes douves. Sur la tour pointue, on voit encore l’empreinte laissée par un boulet tiré par la troupe en 1585… "
Si depuis le XVe le manoir de Joué-du-Bois avait vaillamment résisté aux injures du temps, une fois de plus le débarquement allié de 1944 et les combats sanglants qui l’entourèrent firent une victime d’un témoignage du passé.
Sous l’effet du bombardement qui détruisit le village, toits et planchers se sont effondrés ; le gros œuvre demeure sur lequel une toiture provisoire a été établie, tandis que l’intérieur a brûlé. L’abbé Dumont écrivait à ce sujet : " … Ayant gardé complète l’ordonnance de ses douves avec leurs jolies tourelles d’angle formant un ensemble assez rare, amoureusement conservé, le château renfermait un mobilier ancien et beaucoup d’objets dont la perte est irréparable. Signalons en particulier une très bonne toile de H. V. LEVEILLE, peintre né à Joué-du-Bois. Tous ceux qui ont visité ce manoir regrettent la magnifique grande salle avec sa cheminée monumentale et ses solives apparentes… "
Depuis lors, le manoir est devenu la propriété de la paroisse qui craint de ne pouvoir remettre la demeure en l’état avec les 6 à 7 millions de dommages de guerre qui lui ont été affectés pour ce faire. La donatrice, Madame Paul LORY, âgée de 85 ans a stipulé qu’elle serait heureuse d’y voir installée, si possible, une maison d’œuvres avec des religieuses.
Sur la question archives, il faut signaler que le manoir de Joué-du-Bois ne comprenait plus de chartrier : en y eut-il eu, l’incendie l’aurait fait disparaître. Tel a d’ailleurs été le sort des dossiers de l’historiographe de Joué-du-Bois, l’abbé Maté, qui ont été détruits à Argentan dans la demeure de son héritier.
Pour ceux qui visiteront un jour ou l’autre Joué-du-Bois, on doit noter que sur son territoire s’élèvent de nombreux dolmens de granit rouge qui ont fait l’objet de fréquentes descriptions : les plus importants portent le nom de Pierre du Loup, la Grandière. Il serait non moins intéressant d’aller voir la métairie de la Malardière qui existe toujours et qui avait été l’objet de si longues procédures au début du XVIe.
On peut trouver une excellente photographie d’avant 1944 du Manoir de Joué dans la Normandie monumentale et pittoresque. Lemâle au Havre 1896 (B. N. L. K2 4088).
Notons pour finir le détail des nouveaux vitraux de l’église refaits en 1954. Parmi ceux-ci, quatre petits vitraux de la nef rappellent les quatre pèlerinages locaux :
La Raitière | Chapelle de 1885 - Vierge du Xe. |
La Belle | Chapelle de 1752 - le vitrail reproduit les armes des Fontenay, des Etienne, des Bois Tesselin. |
St-Jacques | Chapelle de 1882, le vitrail reproduit les armes des Poulain de Beauchesne. |
St-Roch | Chapelle de 1839, pèlerinage remontant à 1520. Le vitrail reproduit la statue de St-Roch dont le lévrier porte les armes des BEAUREPAIRE et des LE VERRIER du CHAMP de la PIERRE. Ce vitrail montre aussi celles des LE VERRIER de CHAMPSEGRÉ et des LANGLOIS10. |
Primitivement Louvagny était un 1/8 de fief relevant de Barou et dépendant sans doute anciennement des barons de Courcy qui formèrent au Moyen Age, une des familles les plus importantes de Normandie : Courcy n’est distant que de 2 à 3 km de Louvagny.
Au XIIIe, les Templiers avaient une commanderie à Louvagny. Elle était si pauvre qu’on n’en trouve aucune mention excepté en 1307 quand les Templiers furent arrêtés le 13 octobre. Il n’en faut donc parler que comme d’une commanderie qui pouvait à peine nourrir le chevalier qui y résidait, car à Louvagny, il n’y avait qu’un seul frère et point de cave. Guy PASNAYE, le Templier de Louvagny fut interrogé le dernier et n’avoua une partie des crimes reprochés aux Templiers qu’après l’emploi de la torture, alors que les autres inculpés en avaient convenu plus ou moins spontanément11.
Au début du XVe, la seigneurie de Louvagny appartenait à GIROT LE NORMAND. Les GAULTIER, Sgr de Jort, furent liés d’amitié avec la famille LE NORMAND : dès 1498, on voit Jacques GAULTIER, prêtre, signer au contrat de mariage de Nicole LE NORMAND avec Jean RETOUL12. Pour finir, le 14 novembre 1595, Nicolas LE NORMAND vendit sa seigneurie de Louvagny à Louis de BEAUREPAIRE, 2 333 écus.
Son fils François de BEAUREPAIRE (sur l’intervention de son propre fils Henri de BEAUREPAIRE, lieutenant-colonel au régiment de Folleville) obtint l’érection du fief de Louvagny en plein fief de haubert13 en mai 1651, pendant la minorité de Louis XIV. Cette érection permettait de réunir en un seul fief toutes les terres se trouvant dans les communes de Jort et de Louvagny : elle autorisait " pour la décoration de ce fief, de bâtir château et maison ". Cette faveur n’entraînait aucunement l’octroi du titre de comte ; si à partir de cette époque, le châtelain de Louvagny se le fit pourtant donner, ce n’était là qu’un titre de courtoisie, comme cela a été indiqué ci-dessus.
Rien n’existe au chartrier de Louvagny qui permette de situer avec précision la date de construction du château et de la chapelle seigneuriale attenante à l’église. Il est à noter que l’acte de vente de Louvagny par Nicolas LE NORMAND ne fait mention ni d’un château ni d’une chapelle ; comme plus tard l’érection de Louvagny en plein fief de haubert prévoira la construction d’un château, il est doublement vraisemblable que la demeure actuelle fut bâtie par un de BEAUREPAIRE. La tradition familiale rapporte que le constructeur fut François de BEAUREPAIRE qui mourut le 4 février 1664 âgé de 63 ans. Ce fut lui aussi qui, par des achats successifs, aurait constitué le parc qu’il fit clore de murs.
CAUMONT, dans sa Statistique monumentale du Calvados, rapporte aussi que la chapelle fut bâtie par François de BEAUREPAIRE14.
GALERON dans sa Statistique de l’arrondissement de Falaise indique ce qui suit ; la citation que contient son texte doit être la reproduction d’indications émanant du châtelain d’alors, Alexandre de BEAUREPAIRE… " Le château de Louvagny fut bâti à la fin du XVIIe, et bien qu’il ne remonte pas au temps des guerres de la féodalité, sa forme représente ce que les Anglais, dans leur nomenclature architecturale appellent castellated house, c’est-à-dire un manoir arrangé en château ou en fort. La construction des remparts ou fossés, des bastions, des meurtrières de la tour, de la porte élevée au Nord et percée pour un pont-levis, atteste la pensée du fondateur qui déploya du reste une véritable grandeur dans les dehors du château, dans le parc et dans les avenues de la terre. Du haut de la tour on a une large vue sur tout le pays. L’église est moderne et insignifiante. Une chapelle seigneuriale y est adossée au-dessous de laquelle est le caveau sépulcral des BEAUREPAIRE… "
Actuellement le château de Louvagny se présente ainsi : l’avenue qui y mène après être passée entre deux corps de bâtiment formant communs, aboutit à la face Nord. A quelques mètres de la porte d’entrée se trouvent les restes de l’ancien pont-levis : autrefois, en effet, des douves encerclaient complètement le château, ainsi que cela ressort de la gravure établie par M. de VAUQUELIN en 1829. Seule subsiste maintenant la partie ouest de ces douves : leur suppression fait qu’au midi, la petite tour au toit pointu de pierre n’a plus que deux mètres de hauteur, car elle partait du fond de la douve, comme on le voit sur la gravure.
Entrant dans le corps principal par le Nord, on trouve à droite un grand salon, puis un petit salon.
Aux lieu et place du grand salon, se trouvaient autrefois deux petites pièces : en faisant le grand salon actuel, les boiseries ont été respectées et ce qui manquait a été copié.
Le petit salon servait autrefois de chartrier qui fut transporte ensuite dans un bureau attenant à la salle à manger.
Celle-ci se trouve à main gauche en entrant ; les poutres du plafond gardent la trace du bombardement par artillerie que subit le château en 1944. Au premier étage, il y a diverses pièces dont l’une située au-dessus du grand salon ne paraît pas avoir subi grand changement : les boiseries en ont été refaites d’après un panneau qui était demeuré en l’état.
On voit à l’Est à angle droit avec le corps principal, une aile assez courte : une grosse tour se trouve à leur point de jonction. Cette aile est terminée au Nord par une sorte de pavillon carré. Au rez-de-chaussée de l’aile se trouvent différents communs tandis que la pièce du pavillon servait de bureau : un guichet avait été aménagé dans le mur du corridor qui y mène, en sorte que le châtelain de Louvagny pouvait voir et parler aux gens du pays, comme dans un confessionnal, sans avoir à les faire entrer dans le bureau : il s’agissait d’Alexandre de BEAUREPAIRE, le dernier porteur du nom qui fut propriétaire de Louvagny.
Au premier étage de l’aile, il y a diverses chambres ; celle située dans le pavillon, au-dessus du bureau, comporte une petite pièce d’angle jointive avec quatre fenêtres aux quatre coins, servant de salon à Madame Alexandre de BEAUREPAIRE, née ROBILLARD.
Le parc fermé de Louvagny comporte 103 ha, mais l’étendue des murs de clôture fait que leur entretien n’est plus assuré avec une parfaite rigueur : on y trouve énormément de lapins, car bon an, mal an, il en faut tuer près de 2 000. La chasse aux perdreaux est moins nourrie (300 par an), mais il y a une corbeautière où, au printemps, on peut tirer 5 ou 6 000 corbeaux aux nids, sur des sapins assez bas : le record a été 1 000 corbeaux en une journée.
La chapelle seigneuriale est située le long du chœur de l’église de Louvagny ; elle en est séparée par une grille en bois et est surélevée d’un mètre environ. Au plafond sont peintes les armoiries des alliances de la famille : ce travail a dû être fait dans la seconde moitié du XVIIe puisque l’alliance la plus récente est celle d’Anne de PIÉDOUE qui épousa Henri de BEAUREPAIRE le 10 mai 1657. Les anges qui servent de supports aux armoiries sont assez laids. Le tout est un travail plus curieux par sa naïveté qu’artistique : sous l’effet du bombardement de 1944 un morceau du plafond a été détruit et des traces d’humidité ont abîmé par endroits ce qui est resté intact.
L’autel par contre est assez beau avec quatre personnages en bois aux angles du panneau placé au-dessus de l’autel. Ce panneau porte une peinture religieuse quelconque. Dans l’église elle-même, se remarquent une chaire assez curieuse qui sert en même temps de confessionnal et des fonts baptismaux anciens.
" La chapelle seigneuriale de la famille de Beaurepaire en l’église de Louvagny, en totalité avec l’ensemble de son décor, y compris la claire-voie " a été inscrite sur l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques (Art. arrêté préfectoral du 29/12/1988).
Cet arrêté fait suite à un arrêté du 20/12/1976, inventaire supplémentaire à la liste des objets mobiliers classés, concernant :
L’arrêté de 1988 précise " en totalité " et mentionne " de la famille de Beaurepaire ".
Le cimetière du village de Louvagny entoure l’église. Dans un enclos qui prend entrée sur le cimetière se trouvent des tombes de famille modernes, alors que les tombes anciennes se trouvent soit dans l’église, soit dans le caveau situé sous la chapelle attenante à l’église. Seule l’étude des registres paroissiaux permettrait de déterminer avec certitude les corps qui ont été inhumés, notamment dans l’église et dans le caveau de la chapelle. Voici en dehors d’une telle étude ce qui en a été dit par les uns et les autres.
CAUMONT, dans la Statistique monumentale du Calvados écrit que Louis de BEAUREPAIRE fut inhumé dans I’église en mai 1620 avec sa première femme, Prégente d’OILLIAMSON et sa seconde femme Madeleine le FOURNIER (veuve du Sgr de Vicques) (elle mourut en 1620, 15 jours après son mari). Le même auteur indique que " le tombeau dont l’inscription est la plus effacée doit être, d’après ce qu’on en a pu déchiffrer, celui du père de Louis, Robert, Sgr de la Rozière ". GALERON parle aussi et seulement des tombes de Louis de BEAUREPAIRE et de ses deux femmes.
De nos jours, on voit encore dans le chœur de l’église, les deux tombes de Louis de BEAUREPAIRE, intitulé comte de Louvagny, et celle de Prégente d’OILLIAMSON. Contre la grille séparant la chapelle de l’église, se voit une plaque tombale recouverte en quasi-totalité par un plancher qui empêche d’en lire le texte, tout en le préservant de l’usure des passants15.
Quels sont les corps inhumés dans le caveau ? CAUMONT écrit que le fils de Louis de BEAUREPAIRE, François, fit construire la chapelle et le caveau dans lequel il est inhumé15.
D’après les indications données par notre oncle de POSTEL en 1942, on peut considérer que se trouvent, en particulier, dans ce caveau :
Enfin, on trouve dans le petit enclos du cimetière de Louvagny, des tombes plus récentes, à savoir notamment :
Sur les murs de cet enclos, ont été également dressées les deux plaques tombales rapportées de Pont et la plaque tombale ramenée de Perrières, comme cela est indiqué par ailleurs.
Alfred de BEAUREPAIRE a écrit dans sa généalogie vers 1850 :
" … Simon de BEAUREPAIRE mourut en 16.. et fut enterré à Perrières où sa tombe se voit encore avec cette épitaphe :
Ci-gît le corps de feu noble messire Simon de BEAUREPAIRE, Sgr de Cauvigny Perrières et de Montigny lequel décéda le … jour de l’an 16… Priez Dieu pour son âme.
Julien de BEAUREPAIRE fut enterré à Perrières, son épitaphe est illisible, si ce n’est son nom, aussi on ignore la date de sa mort… "
L’église de Perrières est munie malheureusement d’un dallage moderne : il y a à l’entrée une plaque tombale complètement usée, avec un simple ornement, sans armoiries.
A côté de l’église se trouve un grand bâtiment portant une croix aux deux bouts : le toit à moitié effondré laisse voir des ogives. Il semble que ce soit un bâtiment ancien recouvert après coup d’une toiture plus récente : il s’agit là du prieuré de Perrières décrit en détail par A. de CAUMONT - Statistique monumentale du Calvados.
En 1861, Alexandre de BEAUREPAIRE disait avoir fait venir une plaque tombale de Perrières où elle " gisait abandonnée " : cette expression fait croire qu’elle se trouvait dans le cimetière. Cette plaque qui a été placée dans l’enclos de Louvagny ne correspond à aucune des deux tombes mentionnées ci-dessus, car l’inscription tracée dans un grain assez dur se lit très nettement ainsi :
Ci-gît le corps de feu noble Jacques de BEAUREPAIRE, lequel décéda le 29 Jour de Janvier 1623 (ou 1643). Priez Dieu pour le repos de son âme.
L’écusson aux armes gravé sur la pierre est surchargé d’un chevron et entouré comme ornement d’une cordelière. Sans doute s’agissait-il là d’un prêtre.
Ni CAUMONT ni GALERON ne parlent de tombes à Perrières : peut-être celles qui ont été relevées par Alfred de BEAUREPAIRE étaient-elles dans le cimetière.
Le fief de Pierrefitte mouvait, " noblement et franchement " de la châtellenie de Falaise pour un quart de fief de chevalier.
Pierrefitte, avec Jort, fut dans le temps un des premiers fiefs des GAULTIER : on voit en effet Thomas MAUNOURY, dès le 22 mai 1466, donner aveu à Phélippot GAULTIER d’une vavassorie assise à Vendeuvre et mouvant en foi et hommage de la Seigneurie de Pierrefitte.
C’est, de nos jours, un petit hameau situé entre Vendeuvre et Pont où il n’y a traces ni d’église ni de demeure ancienne. M. MOISANT, vieil instituteur en retraite vers 1938 disait pourtant avoir trouvé des débris de moulures et sculptures dans quelques maisons de ce coin.
Le château de Pont a été détruit en 1944 et remplacé par une bâtisse moderne : les arbres du parc ont été abattus et la nouvelle construction s’élève dans un no man’s land triste à souhait.
L’église, elle, a été démolie en 1832 pour faire place à la route de Rouen à Granville. Son établissement a entraîné par surcroît la disparition du cimetière entourant l’église dont la porte romane achetée par Alexandre de BEAUREPAIRE fut transportée par ses soins dans le parc de Louvagny, près de l’entrée principale.
Les registres de l’état civil des communes de Pont et Vendeuvre réunies contiennent les actes de décès de :
Se trouvaient encore dans l’église de Pont deux autres tombes dont les deux plaques transportées à Louvagny ont été placées dans le mur de l’enclos près de l’église.
La première se lit comme suit :
Ci-gist le corps de Julien de BIAUREPAIRE, écuyer, en son vivant, Sgr de Pont, Pierrefitte, lequel décéda le 12e jour de … Priez Dieu pour le repos de son âme.
La sculpture représente un costume du temps d’un assez beau dessin. L’orthographe porte l’empreinte du patois local, car on lit sur l’épitaphe BIAUREPAIRE et non BEAUREPAIRE.
La deuxième plaque tombale est celle de la femme d’Antoine de BEAUREPAIRE ci-dessus cité. L’inscription se lit ainsi :
Ci-gît noble dame Françoise de ROMAIRE, en son vivant femme de Messire Antoine de BEAUREPAIRE, Sgr et patron de Pierrefitte et de Jort, laquelle décéda le 3e jour de juin 1657.
Il y a lieu de noter que des armoiries figurent sur cette plaque ; on retrouve fort bien celles des BEAUREPAIRE ; celles de la famille de la femme sont peu visibles : on croirait voir un arbre, ce qui correspondrait à la réalité.
Il s’agit là malheureusement d’une pierre friable qui a résisté et résistera mal aux intempéries.
Ni GALERON ni CAUMONT ne signalent l’existence de ces tombes à Pont. Par contre, voici ce qu’écrivait Alexandre de BEAUREPAIRE au sujet de la disparition de l’église de Pont : " … les tombeaux des BEAUREPAIRE placés dans l’église devaient, comme tout l’emplacement, faire place à une route départementale. On a, pour cela, nivelé le terrain et dispersé les cendres des morts. Les ossements étant restés longtemps sur la voie publique, pour éviter cette profanation, j’ai fait exhumer les restes des nôtres, les ai fait réunir dans un nouveau cercueil et transporter processionnellement le 12 juin 1832 au cimetière nouveau. Là, j’ai placé une des pierres tumulaires de Pont avec une nouvelle inscription, en posant les noms de tous les parents dont les os étaient réunis… "19.
Transportons-nous donc à Vendeuvre pour voir la suite de cette question.
La seigneurie de Pontfol appartint à la famille de BEAUREPAIRE dans la deuxième moitié du XVIIe. On dispose de peu de renseignements à ce sujet, car cette branche, après avoir vécu surtout dans l’Est, au hasard de la vie de garnison, a fini par s’éteindre au XVIIIe en Angleterre.
La paroisse de Pontfol ayant été supprimée fut rattachée à la commune de Victot. Celle-ci mit en vente l’église, mais les habitants de Pontfol s’opposèrent à sa démolition. Comme l’église avait été longtemps délaissée, on abattit la nef après 1912 et on transforma le chœur en chapelle. Cet édifice minuscule contient encore un tableau représentant deux personnages, portant l’inscription " Donné par … et … des MANIS Seigneur et dame de ce lieu – 1714 ".
Un souvenir de la famille existait pourtant encore au début du XXe. Le chanoine Simon, archiviste de l’évêché à Bayeux, avait vu, en 1912, dans l’église de Pontfol alors qu’elle était encore entière, un tableau roulé représentant deux BEAUREPAIRE à genoux devant la Sainte Vierge. Leur identification était assurée par une inscription au bas du tableau. D’après les costumes, cette toile devait être du début du XVIIe siècle. Ce tableau a disparu et le desservant actuel de la chapelle, le curé de Hotot en Auge, ne l’a jamais vu, alors que la chapelle étant de proportions restreintes, l’inventaire est assez facile à faire.
Bien entendu, il n’y a trace de tombes, ni dans ce qui subsiste de l’ancienne église de Pontfol, ni dans l’enclos qui l’entourait et servait de cimetière.
Deux manoirs existent encore sur la commune. L’un, celui de Boutémont était habité au XVIIe par les MALOISEL, l’autre, celui de la Vigannerie, à la même époque, par les LE GOUEZ. Le manoir de Boutémont appartient actuellement à Mr AUMONT. Au sujet de la Vigannerie, A. de CAUMONT écrit dans la Statistique monumentale du Calvados : " la Vigannerie formait un fief sur Pontfol. Le manoir construit en bois avait une chapelle et probablement des fossés. Le tout a été démoli il y a quelques années (donc milieu XIXe) et reconstruit. On y voyait deux magnifiques épis en terre cuite qui devaient dater de la fin du XVIe. Ils ont été démontés et déposés sur des tablettes ".
Quant au manoir qui aurait abrité les BEAUREPAIRE à Pontfol, le chanoine Simon ne sait exactement où il se trouvait. On peut d’ailleurs se demander s’il a existé, car peut-être n’y habitèrent-ils jamais puisque, en 1720, Jean-Baptiste de BEAUREPAIRE, Sgr de Pontfol, était domicilié à Gerrots à quelques kilomètres de là. (Cf. B. N. Département des Manuscrits P.0. N° 250).
Si Urbain de BEAUREPAIRE s’était éloigné de Normandie pour s’installer en Picardie, son fils Henri allait revenir s’y fixer et former un dernier centre familial dans cette contrée, qui avait toujours jusque-là abrité les de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY.
Dans la Normandie monumentale et pittoresque, Lemâle au Havre 1895, P. de LONGUEMARE consacre une notice au Quesnay, dont la terre et la seigneurie figuraient parmi les plus anciennes de la vicomté de Bayeux.
Les premiers possesseurs connus furent les FLAMBART qui se retirèrent dans l’évêché de Durham, disgraciés par Henri, roi d’Angleterre, frère et successeur de Guillaume, Duc de Normandie. Ce fief passa en 1580 à Henri de PELLEVÉ, baron de Fiers, puis à demoiselle de CARBONNEL, veuve de François de VARIGNIES, marquis de Montfreville et ensuite à Robert GOSSELIN, capitaine commandant au régiment de Vermandois. En 1789, la terre du Quesnay appartenait à Mlle de GARCELLES qui la vendit après la révolution à J.B. PORÉE de VALHÉBERT.
Une fille de celui-ci épousa le comte d’ECQUEVILLY, en garnison dans la région. C’est ainsi que par la femme d’Henri de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY, Mathilde HENNEQUIN d’ECQUEVILLY, la terre du Quesnay était entrée dans la famille.
La commune du Quesnay qui, vers 1900, comprenait 150 habitants, n’en possède plus que 59 dont 17 à l’agglomération : ce n’est pas une grande ville.
Vue de l’extérieur, l’église a un certain cachet ; sur le côté gauche, il y a une frise avec des têtes d’angelots. Au-dessus de la porte du fond, une pierre porte la date de 1725. L’intérieur de l’église est banal : le banc du château était le premier à droite. Le chemin de croix est peu original : les première et dernière stations ont été offertes par Mme Henri de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY, comme l’indique une plaque de cuivre apposée sous ces deux stations.
La cure se trouve placée au fond d’un chemin qui longe l’église. Un des derniers titulaires fut l’abbé TURGIS qui célébra en 1930 ses cinquante ans de prêtrise et mourut vers 1940.
Mr de VALHÉBERT avait rasé le vieux château du Quesnay, mais ce fut son gendre, le marquis d’ECQUEVILLY qui en acheva la reconstruction, en forme de grande maison carrée.
Le dernier BEAUREPAIRE à vivre au Quesnay y mourut en 1933. Le château lui-même a disparu, comme a disparu le décor de verdure qui l’entourait. En effet, les arbres de haute futaie furent monnayés à cette date, après la mort de Pierre de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY ; puis la maison, abandonnée bien avant son décès, étant tombée complètement en ruine, fut rasée après 1944 et les matériaux vendus.
Seuls témoins d’un passé qui, ici pour la famille, remonte à 1859, subsistent les plaques tombales suivantes, dans le cimetière qui entoure l’église et qui est un tapis de cyclamens en automne :
Si Henri de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY repose au Quesnay, le bombardement de Caen en 1944 a fait disparaître le Monument aux Mobiles du Calvados de 1870 où, sur un bas-relief en bronze, il était représenté, organisant la défense de Dreux. Monté, pour ce faire, dans le clocher de la chapelle des Princes d’Orléans, il se tua en y tombant du haut de ce clocher. Une plaque commémorative rappelle sa mort : elle est placée dans un couloir assez sombre et étroit de la chapelle. Une rue de Dreux porte également son nom, plus ou moins bien orthographié.
Ce fief figurait dans le patrimoine familial dès le XVIe et devait être alors assez important, puisque Robert de BEAUREPAIRE (petit fils aîné de Jacqueline de BEAUREPAIRE) portait le titre de cette seigneurie de préférence, semble-t-il, à celle de Pierrefitte que reprendra son fils Louis avant d’avoir acheté Louvagny.
Le fief de La Rozière se trouvait sur la commune de Notre-Dame-de-Fresnay où vivaient, à la même époque, deux autres familles nobles, les MALHERBE et les BERNIÈRES, dont les sépultures demeurent encore, tandis qu’aucune plaque tombale ne subsiste, ni au nom BEAUREPAIRE, ni au nom GAULTIER.
Au lendemain de la Révolution, vers 1813, les GAULTIER de la Rozière ne possédaient plus qu’un manoir et quelques terres de peu d’étendue. Le manoir a disparu, remplacé par des bâtiments modernes appartenant en 1954 à Mr MOREL ; il se dressait à l’angle des chemins qui vont de Notre-Dame-de-Fresnay à Courcy d’une part, à St-Martin-de-Fresnay d’autre part. Sans doute démembrements du domaine patrimonial, deux autres fermes porteraient encore le nom de La Rozière, l’une située sur la route de Courcy à Notre-Dame-de-Fresnay, appartenant à Mr GIRAUD en 1954, l’autre à l’extrémité inverse de ce village, qui est à 3 ou 4 km de Louvagny.
Au château de Saint-Basile se trouve un représentant du dernier rameau de la famille GAULTIER, qui en porte encore le nom dans les actes de l’état civil, quoique lui et les siens soient plus souvent désignés sous celui de SAINT-BASILE auquel ils ont droit non moins légitimement et qui figure également dans ces mêmes actes.
Ce château est en réalité une toute petite maison moderne perdue dans les bois. Elle est située dans un coin de Normandie où les routes secondaires sont encadrées par des haies qui se rejoignent au sommet ; le voyageur chemine de tunnel de verdure en tunnel de verdure ; si le passant est rare, si la carte est mal lue, la promenade peut durer longtemps sans atteindre son point d’étape20.
N’ayant pas visité les lieux en détail, seul sera reproduit ici ce que GALERON a écrit dans sa Statistique de l’Arrondissement de Falaise ; CAUMONT est muet sur la question.
… " La paroisse de St-Basile a été réunie à Tortisambert : on y trouve la tombe de Madame de SAINT-BASILE, née FOUCAULD, morte il y a peu. Le fief de SAINT-BASILE était mouvant du fief voisin de LAUNAY-BERNARD, qui dépendait de la paroisse de Montpinçon avant d’avoir été rattaché à celle de St-Basile. Le fief de CROPUS appartenait aussi aux GAULTIER de St-Basile. La terre du Tertre sortit de cette famille avec le mariage de Marie Anne, Madeleine GAULTIER de SAINT-BASILE et de Félix HAUVEL en 1777… Sur la paroisse des Autels voisine, s’élève le manoir des Autels, propriété de M. GAULTIER de HAUTESERRE, ainsi que le manoir de MENIVAL21. Sur cette paroisse se trouvait le fief des AUTHIEUX…
… Sur la paroisse de GARNETOT, un château moderne appartient à M. GAULTIER de GARNETOT (qui était le fils de M. GAULTIER des AUTHIEUX) : on y trouve le portrait de Charlotte CORDAY (alias Marie de CORDAY) l’héroïne était la tante à la mode de Bretagne du châtelain… "
Le château de Garnetot appartient encore à la dernière descendante des GAULTIER de GARNETOT, Mme LEBLANC, qui n’a pas eu d’enfant de son mariage.
Le comte Louis de NEUVILLE corrobore les indications ci-dessus, avec quelques précisions complémentaires :
Selon un aveu rendu à la Cour des Comptes, le 5 novembre 1607 par Jean LE PAULMIER, le fief de Vendeuvre était un plein fief de haubert contenant un domaine non fieffé de 3 acres (203 ares). Peu avant 1674, Antoine de BEAUREPAIRE écuyer, Sgr de Pierrefitte, Pont et Ailly22 avait acquis par échange d’Auguste LE PAULMIER) le fief noble et seigneurie de Vendeuvre contre le fief noble et seigneurie de Villers-en-Jort qui avait été acheté le 15 mars 1549 des religieuses de Villers-Canivet par Gratien GAULTIER.
A la mort d’Antoine de BEAUREPAIRE, le fief de Vendeuvre dut être démembré, car Marc Antoine de BEAUREPAIRE obtint par actes de 1697 et de 1698 tout le domaine de Vendeuvre, actes passés avec Pierre de BEAUREPAIRE, Sgr de Pierrefitte, son frère aîné et Daniel GAULTIER, Sgr de la Rosière23.
L’unique fille de Marc Antoine qui naquit à la fin de 1708 allait apporter en dot la seigneurie de Vendeuvre : en effet, Jeanne Gabrielle Antoinette de BEAUREPAIRE, fille de Marc Antoine de BEAUREPAIRE et de Jeanne Gabrielle de CAUVIGNY épousa le jeudi 29 janvier 1739, Alexandre LE FORESTIER.
Dans les registres de l’état civil de Vendeuvre, on trouve les actes de décès de ces quatre personnes :
L’église placée au bout du village, tout près du château, a gardé son dallage ancien, exception faite hélas de l’allée centrale et du chœur pavés en matériaux modernes.
Ce qui subsiste du dallage ancien est caché par un plancher sur lequel les bancs sont posés. L’existence de ce dallage est révélée par la présence d’un poêle à l’emplacement duquel le plancher est arrêté. Bien que les tombes soient en général situées seulement dans le chœur, il est possible qu’il en existe dissimulées par le plancher, mais ce n’est qu’une hypothèse bien fragile.
Dans le cimetière, il y a un caveau moderne au nom des LE FORESTIER, comtes de Vendeuvre.
La pierre posée par Alexandre de BEAUREPAIRE lors du transport des corps du cimetière de Pont à celui de Vendeuvre, a pu être repérée à 3 ou 4 mètres de l’entrée du cimetière grâce à la mémoire d’un ancien instituteur, M. MOISANT, âgé de 80 ans en 1938 : la plaque tombale en effet ne laissait plus subsister que quelques lettres dont celles du début de BEAUREPAIRE. Les traces restantes permettaient pourtant de vérifier les dires de M. MOISANT et de constater que la pierre non sculptée ne représentait aucun costume du temps. L’envers de cette plaque n’était pas sculpté non plus.
Une pierre a été érigée debout devant la vieille tombe et porte l’inscription suivante :
" Ici reposent plusieurs membres de la famille de BEAUREPAIRE de LOUVAGNY, exhumés en 1832 de l’église de Pont. In memoriam 1938 ".
Ni A. de CAUMONT ni GALERON n’ont signalé de tombes à Vendeuvre. Le château de Vendeuvre du XVIIIe demeuré en l’état a été assez abîmé par l’occupation des troupes allemandes de 1940 à 1944. On leur doit la destruction quasi totale du chartrier qui contenait surtout des archives LE FORESTIER.
Ce château ne garde pas trace du séjour des BEAUREPAIRE à Vendeuvre.
Je dirai ici quelques mots du Berri, où mon père, à partir de son mariage qui lui fit abandonner le Quesnay, et ma mère vécurent toute leur vie, en sorte que notre centre familial s’y trouva de leur vivant.
L’hiver se passait à Bourges, dans une maison louée, 20, Avenue Sérancourt : elle se trouvait à la verticale de la rue qui joint à peu près en ligne droite cette avenue au porche, côté épître, de la cathédrale. L’été, mes grands-parents, après avoir fermé leur hôtel, 7, rue Jacques-Cœur et envoyé par la route cocher et chevaux, s’installaient à 100 km de là, à Boismarmin, sur les bords de la Creuse et y recevaient leurs enfants. La plus grande partie de mon enfance s’est déroulée à Boismarmin, car la guerre de 1914 nous y ayant surpris, nous vécûmes là jusqu’en 1928 ; à la mort de mon grand-père, mes parents retournèrent à Bourges et passèrent le reste de leurs jours, 7, rue Jacques-Cœur.
L’hôtel de la rue Jacques-Cœur avait été acheté par Joseph MARTIN de MAROLLES par acte reçu par J. DUMONT le 24 septembre 1772. C’était l’arrière-grand-père de ma grand-mère de BOISMARMIN née MAROLLES.
Cette demeure doit remonter à Charles VII et être de la même époque que le palais Jacques-Cœur qui lui fait face. Elle a été vendue en 1953 à Jean de BENGY et reste donc ainsi encore dans la famille. Le grand-père MAROLLES de ma grand-mère de BOISMARMIN avait épousé en effet Catherine de BENGY, tandis que la grand-mère de mon grand-père de BOISMARMIN, Mme GASSOT de CHAMPIGNY était également née BENGY, d’où notre parenté certaine quoique lointaine avec les innombrables BENGY qui pullulaient un moment dans Bourges et qui restent encore très nombreux de par le monde.
C’est au cimetière des Capucins près de la cathédrale qu’ont été enterrés à Bourges mes parents, avant leur transfert à Grivesnes. S’y trouvent aussi d’autres tombes très nombreuses de la famille de ma mère, originaire du Berri, de tous les côtés. Bien qu’elles ne présentent qu’un intérêt indirect pour ces quelques notes, elles sont indiquées ci-après, à peu près dans l’ordre où elles sont disposées, car les inscriptions qu’elles portent, usées par le temps, deviennent difficiles à lire :
En dehors des plaques tombales ci-dessus indiquées qui se trouvent groupées ensemble, face à la porte du cimetière et à quelque vingt mètres de l’entrée, on trouve d’autres tombes plus récentes, notamment celles de Georges de BOISMARMIN (frère de mon grand-père BOISMARMIN) et de son fils, Mgr de BOISMARMIN24.
La seigneurie de BOISMARMIN, sur Chitray (Indre), appartint à une famille de ce nom, primitivement même appelée MARMYNS, dont on trouve des traces éparses de 1120 à 1407.
Elle passa par alliance :
La chambre de mes parents à Boismarmin était située à l’extrémité ouest de la maison, du côté de la Creuse ; c’est à mon seul avis, jusqu’à présent, un lieu historique, depuis le 30 décembre 1905 où je m’y trouvai pour la première fois devisant agréablement…
Cette chambre était obscurcie par deux énormes sapins plantés à la naissance de mon grand-père de BOISMARMIN et de son frère : l’un fut déraciné par la tempête, l’autre, abattu en 1953, âgé de quelque 120 ans et en mesure de vivre encore de nombreuses années.
La chapelle de Boismarmin fut édifiée au XIXe : le bénitier et le banc qui s’y trouvent proviennent de l’ancienne église de Chitray, datant du XIVe, abandonnée en raison des trop fréquentes inondations de la Creuse qui l’envahissaient chaque hiver. Le village s’étant déplacé semble-t-il pour éviter ces inondations, l’ancienne église était également devenue trop distante de l’agglomération. Ce banc avait dû être établi à l’époque de la dernière descendante des MALLERET, Catherine qui épousa François de FOURNIER, car sont gravés sur ce banc, la date de février 1641, deux écussons représentant les armes MALLERET à la croix ancrée et un 3e écusson non identifié.
Le caveau de la chapelle renferme les restes de plusieurs THOMAS des COLOMBIERS de BOISMARMIN, dont mon grand-père et ma grand-mère, née MAROLLES.
Dans l’horrible église moderne, la chapelle côté Evangile est éclairée par deux vitraux, portant l’un, les armes des BOISMARMIN et MAROLLES, l’autre, celles des BEAUREPAIRE et BOISMARMIN. Le maître-autel en pierre, donné par ma mère au moment de son mariage, porte également un écusson armorié.
La terre de Boismarmin jusqu’en 1928 comprenait :
Avec différents petits bois, cela formait un bloc de quelque 600 ha baignés sur un peu plus d’un kilomètre par la Creuse au Sud et limités au Nord par la Brenne.
Sur ce territoire la vie coulait bien tranquille pour nous, éclairés au pétrole, transportés en voiture à chevaux (landau, coupé, break, victoria, tonneau ou carriole anglaise) dépaysés dès que l’on avait dépassé les 25 km maximum du rayon d’action sur des routes empierrées, poussiéreuses, semées de nids de poule, où de lourdes bicyclettes n’étaient guère agréables à pousser, nourris à des heures maintenant étranges, c’est-à-dire, le déjeuner à 11 heures et le dîner à 7 heures, distraits par les seuls plaisirs de la chasse, de la pêche et relisant le soir à la lueur tremblante d’une lampe pigeon, éternellement les mêmes livres d’une bibliothèque meublée des Histoire des Ducs de Bourgogne, Veillée des Chaumières ou [ouvrages modernes ( !)] du dernier Driant.
Et comme nous n’avions aucun point de comparaison, nous trouvions cela normal et donc parfait.
Citons pour mémoire une propriété inhabitée depuis plus de cinquante ans quand elle fut vendue en 1953 ; le château de St-Georges-sur-Moulon, à 10 km de Bourges, se composait d’un petit manoir du XVe séparé d’une maison d’habitation tout en longueur, attenante aux bâtiments d’une ferme d’une vingtaine d’hectares.
La région est surnommée la petite Normandie à cause de ses vallonnements et des pommiers qui couvrent les champs.